Paulownia
Sylvie Bocqui
Une femme et un homme se séparent. C’est l’homme qui part, qui fait le pas irréversible, laissant derrière lui sa femme, mère de leurs deux enfants, sonnée, comme interdite.
Il part, il est déjà loin, happé par une autre histoire, un nouvel amour. Il disparaît et elle reste dans une sidération qui l’empêche. Peu à peu, elle revient à elle, reprend vie, s’ouvre à nouveau aux sensations, aux signes, et tout à coup le rouge d’une robe la tient debout, le vert précieux d’un légume la protège. La lente chute d’une fleur dans la lumière du printemps l’irrigue. Et vient alors un autre homme, des voyages, un train qui part et qu’elle ne prend pas.
Puis l’écriture. La possibilité de l’écriture.
Comme dans chacun de ses textes, Sylvie Bocqui nous livre au plus juste l’indicible et les variations du cœur. Dans un entrechoquement de sons, de sensations, de couleurs, elle raconte la fin d’un amour et l’après de cette fin.
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Paulownia
Sylvie Bocqui
Elle le lui a dit souvent, « Maintenant c’est fini, je veux qu’on se sépare. » Lui répondait « Oui, il y en a assez ! » et ils ne se séparaient pas. Au début, elle le disait doucement. C’était un drame, mais doucement dit. Encore une supplication, peut-être. Puis le dire doucement n’a plus suffi ; il lui a fallu crier, vociférer à devenir laide, faire claquer la porte sur des mots plus urgents, de plus en plus urgents – « C’est terminé, c’est fini, il faut qu’on se quitte, tu m’entends ! Qu’on se quitte ! » Lui désormais ne répondait plus rien, ou un morne « Oh arrête, tu veux ? » qu’elle n’entendait pas, qu’elle écrasait dans la porte. Même parvenus à ce point, ils ne se séparaient pas.