Anecdotes enfantines
Elsa Morante
« J’étais la première de la classe. Les autres petites filles, en cachette, me mettaient dans la poche des nougats ou des objets en terre cuite comme des casseroles ou des poêles miniatures. Mais je savais qu’elles ne m’aimaient pas et qu’elles le faisaient par intérêt, afin que je leur souffle les réponses et les laisse copier mes devoirs. Rien d’étonnant du reste, car je ne m’aimais pas moi-même. »
Il y a déjà tout Morante dans ces premières lignes. L’enfance farouche, l’Histoire, et cette fascinante volonté d’être toute liée à la douleur d’être.
De juin 1939 à janvier 1940, Elsa Morante évoque ses souvenirs d’enfance dans la revue Oggi.
Elle revit à travers ces quinze récits les moments les plus intenses de son enfance. Depuis les jeux avec ses frères jusqu’à ses premières amours, sans oublier ses camarades de classe et ses dignes institutrices, c’est sur un ton ironique et malicieux qu’elle raconte cette époque insouciante.
La jeune Elsa apparaît pleine de vitalité, d’imagination, et toujours exubérante. Elle s’improvise metteur en scène, crée une pièce de théâtre et tombe amoureuse de l’aviateur Lindberg à qui elle envoie des lettres passionnées.
« Je lui écrivais qu’en dehors de lui aucun homme n’existait, et j’avançais au milieu des autres, hautaine, portant à la place du coeur un feu sacré. »